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« On n’élève pas de stèle mortuaire à la mémoire des Justes. Le rappel de leur enseignement constitue le meilleur hommage à leur rendre ». Talmud de Jérusalem – Traité Shekalim (II,5).

Découvrez des lieux emblématiques de la ville de Troyes en suivant les pas de Rachi…

Étape
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Qui est Rachi ?

Qui est Rachi ?

Rachi est un érudit juif du XIe siècle, considéré comme l’un des plus grands commentateurs des textes sacrés du judaïsme que sont la Bible et le Talmud. Son nom est en réalité l’acronyme de Rabbi Chlomo ben Isaac (Rabbin Salomon fils d’Isaac).

Né à Troyes en 1040, Rachi y passe sa jeunesse, avant de partir étudier en Rhénanie, dans les écoles juives de Mayence, puis de Worms, auprès des meilleurs maîtres de sa génération.
De retour à Troyes après de longues années d’étude, il fonde sa propre école qui accueillera près d’une vingtaine de disciples, venus principalement de France méridionale et d’outre-Rhin.

Rachi acquiert une renommée immédiate à l’échelle européenne en raison de l’originalité de la méthode d’exégèse qu’il développe. Cette interprétation approfondie et critique très moderne de la Bible et du Talmud est principalement basée sur une approche littérale des textes. Elle facilite l’accès de tous aux textes de la Tradition juive.

Rachi a trois filles, Myriam, Yocheved et Rachel. Au siècle suivant, ses gendres, petits-fils et arrière-petits-fils pérennisent son oeuvre en créant la fameuse école des Tossafistes. Celle-ci prend naissance dans les villages de Ramerupt et Dampierre au nord de Troyes et perdure jusqu’au XIVe siècle, incluant des centaines de disciples de toute l’Europe, rompus à la méthode de Rachi.

Rachi est considéré comme le Sage de sa génération. Il meurt à Troyes le 13 juillet 1105, à l’âge de soixante-cinq ans. Son lieu de sépulture n’a jamais été identifié puisqu’il se trouvait dans le cimetière juif médiéval de Troyes, détruit au XVIe siècle, qui se trouvait entre le Théâtre de Champagne et la Médiathèque Jacques-Chirac.

Prenez la direction du quartier Saint-Frobert en empruntant la rue Georges-Clémenceau.

Quartier Saint-Frobert

L’actuel quartier Saint-Frobert constitue l’ancien quartier juif de Troyes, du temps de Rachi. Il regroupe les rues Hennequin, Saint-Frobert, du Paon, des Cordeliers, Audiffred et Boucherat.

Dirigez-vous vers la rue du Paon.

Angle rue du Paon / rue de la Cité

Vous voici à l’angle des rues du Paon et de la Cité.

Au Moyen-Âge, le quartier porte le nom de « Broce-aux-Juifs », « broce » signifiant « forêt » en champenois.
Au XIe siècle, il abrite environ une dizaine de familles juives, dont celle de Rachi.
Situé dans l’enceinte de la première ville fortifiée et à proximité immédiate du château des Comtes de Champagne, les juifs y jouissent de conditions de vie plutôt favorables.
Du XIe au XIIIe siècle, de nombreux échanges animent les relations entre juifs et chrétiens qui pratiquent les mêmes métiers, travaillent les uns chez les autres, parlent la même langue et s’habillent à l’identique. Les signes distinctifs imposés aux juifs apparaissent seulement en 1269, sous l’initiative du roi Louis IX. En Champagne, il s’agit de la rouelle, une pièce d’étoffe ronde, jaune ou orangée, cousue devant et derrière leurs vêtements pour les rendre identifiables par la population.
Rachi résidait probablement sur l’emplacement de l’actuelle rue du Paon à proximité de vignes. Les maisons que vous pouvez observer datent du XVIIe siècle. Aucun vestige ne subsiste du temps de Rachi.
Aux XIe et XIIe siècles, même dans l’espace urbain, la grande majorité des juifs travaille la terre pour subvenir à ses besoins. Ce n’est qu’au XIIIe siècle que la propriété terrienne leur sera retirée par le roi Louis IX. Ainsi, Rachi pratique probablement le métier de vigneron et ses petits-fils, Samuel et Jacob, habitants de Ramerupt, sont respectivement éleveur et commerçant en vin.

Prenez la direction de la rue Saint-Frobert en empruntant la rue de la Cité.

Rue Saint-Frobert

La rue Saint-Frobert et le quartier actuel, portent le nom d’une ancienne église transformée aujourd’hui en immeuble d’habitation. On raconte, sans preuve, qu’elle aurait été édifiée sur le site d’une synagogue médiévale.

Une synagogue n’est pas un bâtiment sacré, ni obligatoire. Seul le rouleau de la Torah qui s’y trouve est sacré. Du temps de Rachi, les moyens et les besoins d’en construire une n’étaient pas nécessairement réunis pour une si petite communauté. Le culte se déroulait donc probablement au domicile des érudits de la ville.

Poursuivez dans les rues Saint-Frobert et Vieille Rome, en direction de la place de la Tour.

Place de la Tour

Vous êtes arrivés place de la Tour, où se dressait autrefois le château des Comtes de Champagne.

Le château des Comtes de Champagne se situait à la lisière des murailles nord-ouest de la ville du XIe siècle. Le rondeau, ou donjon, tour fortifiée aujourd’hui disparue, a donné son nom à la place sur laquelle vous vous trouvez.
Au Xe siècle, le château surplombe la toute petite ville de Troyes entourée de murailles, formant un rectangle allant du quai Dampierre à la rue des Trois Godets.

La première communauté juive troyenne connue de l’époque médiévale est installée entre le château et la première cathédrale.
Elle se développe grâce à la protection que lui accordent les Comtes de Champagne du XIe au XIIIe siècles, entre les règnes de Thibaut II, Henri Ier le Libéral et Thibault IV.
Très curieux et avant-gardistes, les Comtes de Champagnes aiment les arts et la littérature. Ils s’intéressent aux juifs et à leur connaissance des textes sacrés.
Le petit-fils de Rachi, Jacob, plus connu sous le nom de Rabbenou Tam, installé à Ramerupt, occupe vraisemblablement des fonctions à la cour de Champagne et échange avec Henri Ier le Libéral sur les interprétations de la Bible. Une fresque réalisée en 2023 à Ramerupt en témoigne

Rejoignez le Mémorial Rachi par la rue des Cordeliers. Traversez pour vous rendre sur le parvis du Théâtre de Champagne

Mémorial Rachi

Le Mémorial se trouve face au Théâtre de Champagne. Placez -vous devant la sculpture de façon à faire face au théâtre.


Le cimetière juif médiéval de la ville, aujourd’hui disparu, se trouvait à l’entrée du quartier de Preize à l’extérieur des remparts, entre la rue de Preize et l’actuelle Médiathèque Jacques-Chirac. Il jouxtait un cimetière chrétien.

Pour rappeler ce lieu, le « Mémorial Rachi » ou « Sphère Rachi » est inauguré à l’occasion de l’ouverture de l’Institut universitaire européen Rachi en 1990, en présence d’Elie Wiesel, prix Nobel de la Paix. Ce monument se situe devant le Théâtre de Champagne.

Réalisée par le sculpteur Raymond Moretti (1931-2005), cette grande sphère en acier carbone, de 2,20m de diamètre sur 2,80m de hauteur, repose sur un socle en granit de forme hexagonale. Ce socle représente la France et est illustré par un dessin de sefirot, les dix degrés du monde divin dans la mystique juive.
Bicolore, la sculpture reprend la symbolique des contraires et présente, en découpe en creux, à l’intérieur de la sphère, l’acronyme de Rachi en hébreu.

À l’origine, un faisceau lumineux pointait vers le ciel, symbole de l’infini. Cette lumière a été supprimée quelques mois après l’inauguration afin de ne pas gêner le trafic aérien.

Remontez le boulevard Gambetta jusqu’à l’allée menant à la Médiathèque Jacques-Chirac.

Esplanade de la Médiathèque Jacques-Chirac

Au XVIe siècle, plus aucun juif n’habite en Champagne, expulsés par le roi Philippe le Bel en 1306, puis définitivement par le roi Charles VI en 1394.


Aussi, pour agrandir la ville au-delà des remparts, le cimetière chrétien est déplacé et le cimetière juif détruit.
Il est attesté dans plusieurs manuscrits que Rachi est mort le 13 juillet 1105 à Troyes.
À la construction de la médiathèque en 2002, les fouilles préventives n’ont cependant pas permis de retrouver de trace de sa tombe ni d’autres tombes juives.

Depuis 2005, en mémoire de Rachi et des Tossafistes, l’esplanade située devant la médiathèque porte le nom de « Salomon de Troyes, dit Rachi ».
La Médiathèque Jacques-Chirac possède un fonds ancien inscrit depuis 2009 au registre « Mémoire du monde » de l’UNESCO, qui provient en grande majorité de la bibliothèque de l’Abbaye de Clairvaux, fermée à la Révolution. Saint Bernard, premier Abbé et fondateur de Clairvaux au XIIe siècle, est à l’origine de cette bibliothèque. Rapprocher Rachi et Saint Bernard sur ce même lieu en fait un symbole de cette Renaissance du XIIe siècle, illustrée notamment par ces deux figures intellectuelles et spirituelles majeures de la Champagne médiévale.


Dirigez-vous vers la rue Brunneval en traversant le boulevard Gambetta et en empruntant la rue Jules-Lebocey. A gauche, prenez la rue de la Madeleine dans son entièreté. Remontez ensuite vers la rue Charbonnet, puis la rue du Palais de Justice. La première intersection à gauche marque le début de la rue Brunneval.

Rue Brunneval

Les synagogues, quartiers et cimetières juifs du Moyen-Âge de Champagne n’ont pas survécu aux aléas du temps.

Les juifs de la région ont été expulsés comme tous ceux du Royaume de France en 1394 pour une période de quatre siècles. Une communauté juive s’est à nouveau installée à Troyes, vraisemblablement à la fin du XVIIIe siècle. L’emplacement d’une synagogue à l’époque moderne n’est pas connu. Celle du XXe siècle était située rue Charles-Gros, mais a été détruite pendant la Seconde Guerre mondiale.

Depuis 1960, un immeuble du XVIIe siècle comprenant 2000m² de bâtiments, restauré en 2016, fait office de synagogue.
Aujourd’hui, après une activité intense jusqu’aux années 1990, une petite communauté continue à s’y réunir chaque samedi, le Chabbat, sous un magnifique dais de verre et de dentelle métallique, couvrant la salle de prière.

Depuis 2017, parallèlement au culte, le site abrite aussi la « Maison Rachi », une exposition permanente visant à faire découvrir Rachi, son histoire et son oeuvre, grâce à une scénographie immersive.

En face, l’Institut universitaire européen Rachi a ouvert ses portes en 1989. Il s’agit d’un centre universitaire d’études et de recherches hébraïques ouvert à tous. Il est consacré aux études juives et sémitiques et à la recherche sur les monothéismes. Les cours, soirées-débats, conférences, dispensés toutes l’année, apportent des pistes de réflexion sur le dialogue entre les cultures et religions. Une exposition intitulée « Rachi et les juifs de Troyes au Moyen-Âge », conçue par la Médiathèque Jacques-Chirac, ainsi qu’une bibliothèque, vous accueillent gratuitement.
Dans la salle de conférence du rez-de-chaussée, vous découvrirez une sculpture réalisée par Raymond Moretti, intitulée « Yonah » (« Colombe » en hébreu) et réalisée à partir des lettres de l’alphabet hébraïque. Elle illustre l’espérance de paix et de spiritualité.

Rendez-vous vers la rue de la Synagogue, en parcourant la rue Brunneval dans son entièreté. Empruntez ensuite la rue Juvénal des Ursins, et poursuivez sur le début de la rue Turenne. Sur votre droite se trouve la rue de la Synagogue.

Rue de la Synagogue

La rue de la Synagogue longe le côté nord de l’église Saint-Pantaléon. Elle fait partie des toponymes de France rappelant des sites ou des personnages liés à l’histoire de la communauté juive.

Ce nom n’a pas pu livrer ses secrets malgré de nombreuses années de recherches historiques.
Il est pourtant probable que cet emplacement ait vu naître un second quartier juif à partir du XIIe ou XIIIe siècle, au moment où la ville accueille les réputées Foires de Champagne qui drainent une population importante et font de Troyes un carrefour économique majeur du Moyen-Âge sous l’impulsion des comtes.
La partie ouest de la ville du XIIIe siècle, coupée en deux par le canal actuel, est la ville commerçante par excellence et reçoit à l’époque marchands et biens, stockés dans les caves voûtées à un, deux ou trois niveaux, encore visibles aujourd’hui dans certaines maisons.