« Rossignol de mes amours, vient chanter sous ma fenêtre ……. »
Couplets et musique de Raymond Vincy et Francis Lopez
Le rossignol philomèle, vous savez l’oiseau qui vous réveille et que vous écoutez la nuit sans raison particulière, le rossignol mâle a le chant le plus contradictoire qui domine l’agitation fébrile du monde, pour porter ses notes à décortiquer les lettres du mot « amour ».
De sa silhouette élancée coule une source intarissable dans la fraîcheur du sous-bois.
Il donne à qui veut prendre, tout ce qui s’échappe naturellement de son gosier, sans rien livrer du mystère qui l’habite.
Il chante. Qui sait, pour la nature, les arbres, les plantes, ses semblables ? Peut-être pour la création entière ? Pour les poètes aussi ?
A-t’il quelque chose de particulier, ce « modeste », à s’évertuer ainsi aux heures les plus chaudes de la journée ?
Ainsi, un prodige de quelques grammes improvise des ritournelles, confisque les grains de poussière, les commute en brillantes roulades, abrase l’infini des impuretés : quels tours de force, face à nous !
Débusqué dans ce bosquet, nous l’adoptons à vie, à l’égal du diamant, nommé solitaire.
Au crépuscule, « à en perdre haleine », ses strophes nerveuses et éclatantes dominent le dernier concert de la gent ailée, lorsque enfiévré, il dévoile sans importuns, son sens des nuances.
Clamant aux quatre points cardinaux, une énergie et une force de propos, il faudrait être sourd pour l’ignorer.
D’une envoûtante aubade s’égrappent les notes d’une portée, des notes en pièces d’or voluptueusement saisies par le vent qui les abandonne aux nues.
Il est dit qu’il ne compte pas et que ce qu’il lègue est inépuisable et gracieux.
Symbole parmi les symboles, il attend patiemment l’évanouissement du babil forestier, amorçant quelquefois une interminable symphonie de seize heures.
D’où vient ce migrateur pétri de mélodies, aux vocalises entrecoupées de silence ?
Après un hivernage en Afrique tropicale, il apparait de la fin du mois d’avril jusqu’en août, s’installe dans la forêt, sur son site de reproduction de l’année précédente, après avoir volé de nuit, traversant la Mer Méditerranée, les détroits de Gibraltar et de Messine, sur un parcours de plus quatre mille kilomètres.
Il offre rapidement à l’espace un crescendo d’accents rauques et saccadés, pour marquer rapidement par sa musique, son existence et son emplacement de nidification.
Ce volatile d’allure discrète, d’un plumage terne, compense cette infirmité par de bien cruciales emphases.
Avec constance, la femelle construit son nid près du sol, en quelques jours.
Elle sélectionne des feuilles, des brindilles, en tapissant à la perfection le fond de l’œuvre avec du crin et de fines herbes sèches, surveillée de prêt par le mâle qui repousse les intrus.
Six œufs, vert olive, sont déposés et couvés en treize jours. Les petits, nourris par leurs parents, acquièrent une autonomie en vingt jours.
Leur durée d’apprentissage familiale au chant conditionne la qualité du timbre de leur voix à l’âge adulte.
Lorsqu’ils pourront enfin s’exprimer, ils le compléteront d’incantations avec des touches personnelles.
Tout en agrément, ces vingt-deux grammes et dix sept centimètres suffisent à habiller une éloquence, en espérance de vie de six ans, chez un Artiste décrit par le grimoire, comme talentueux, ce qui suscite autour de lui bien des convoitises.
Promeneuses, promeneurs, lorsque vous prendrez au printemps le chemin de la forêt, ne cherchez pas ce passereau farouche. Arrêtez-vous, fermez les yeux et écoutez ses emphases dans le secret de votre cœur.
Après cette lecture silencieuse, essayez de l’imaginer mentalement, remerciez- le de vous ravir aussi bien et de prodiguer tant de bienfaits.
Photos : Entête © Thomas Griesohn-Pflieger